Darchari MIKIDACHE, président de l'ONG USHABABI WA MESO INTERNATIONAL lors d'une réunion publique à Tamatave Madagascar.
Par Darchari MIKIDACHE
Comment rester impassible fa e à la désespérance des jeunes diplômés de l'Université des Comores et des lycéens qui ne poursuivent pas leurs études en quête d'un travail digne ?
Le chômage massif des jeunes et des moins jeunes qui touchent plus de 50% de la population active est un fléau qui met en danger la Nation à plusieurs titres.
En premier lieu, les jeunes quittant le système scolaire ou universitaire en dépit de leurs diplômes du Baccalauréat à des diplômes supérieurs se retrouvent démunis sans un système d'accompagnement
post-études. Ils sont à la merci du bon vouloir des politiques ou des pouvoirs publics et directeurs généraux ou régionaux des sociétés d'État, agences ou Administrations autonomes pour des stages peu encadrés et à peine rémunérés avec des promesses d'embauche qui ne se concrétisent que rarement pour les plus chanceux.
En second lieu, cette absence d'activités rémunérées ou rémunératrices constitue une épée de Damoclès sur les jeunes qui sont obligés soit de s'enfermer chez eux, soit de chercher à quitter le territoire comorien au péril de leur vie, soit se politiser en soutenant une personnalité du régime ou d'autres partis en espérant être recrutés au bout du compte. Certains se sont obligés de se prostituer afin de survivre. Tout cela reste inacceptable et un danger pour la cohésion sociale et un handicap pour l'avenir de notre pays.
D'autres jeunes soutenus moralement ou financièrement par leurs parents directs ou proches parents expatriés se démènent tant bien que mal pour se créer une petite activité informelle afin de rester autonomes et garder leur dignité.
La majorité des situations que vivent la jeunesse comorienne comme les moins jeunes désespérés est intolérable. On ne peut se contenter des mesures annoncées par les pouvoirs publics notamment l'accompagnement financiers des jeunes porteurs de projets les meilleurs en négligeant d'avoir sur les fondamentaux pour améliorer la situation de la jeunesse estudiantine dans leur acquisition de savoir et de savoir-faire en amont.
Les dirigeants publics doivent avant tout renforcer les conditions d'études des jeunes à l'Université des Comores comme dans les lycées publics en termes logistiques, pédagogiques, éducatives et sociales avec des enseignants mieux formés et rémunérés correctement sans arriérés de salaires et traitements.
De même un système de bourses nationales pour les études supérieures dans des secteurs dits prioritaires pour le développement avec une sélection des meilleurs élèves sur l'ensemble des îles Comores est vital pour soutenir la jeunesse. Des bourses nationales sur critères sociaux et universitaires et réparties équitablement sur les 3 îles gérées par le gouvernement central peuvent être mises à place à condition que leurs attributions soient transparentes avec des critères prédéfinis et impartis avec une attribution par des Commissions régionales indépendantes. Le financement de ces bourses pourrait être issu sur une combinaison des fonds RAU (Redevances Administratives Uniques) de la DOUANE et d'une partie des fonds spéciaux de la Présidence, de l'Assemblée nationale et d'autres institutions. Une taxe sur les hydrocarbure pourrait en compléter le financement.
Des pôles et réseaux de lycées publics techniques et professionnels doivent être créés dans chaque île pour accompagner les lycéens désirant apprendre un véritable métier afin de pouvoir travailler directement. Cela doit commencer par la réhabilitation du lycée technique et professionnel situé à Ouani à Anjouan.
Au niveau de la formation académique des jeunes à l'Université des Comores comme au niveau terminal des lycées publics et privés, un module de blocs de formation professionnelle d'adaptation à la vie active devrait être mis en place. Son contenu devrait être décidé en concertation avec les syndicats des opérateurs économiques, le corps enseignant, les syndicats professionnels. Il devra comprendre notamment des formations en commerce électronique, entrepreneuriat, gestion de projets, informatique, commercialisation, comptabilité de base et fiscalité.
De même, à la sortie du système scolaire ou universitaire, la Maison de l'emploi (MDE) qui doit être dotée de moyens substantiels à défaut une agence nationale pour la promotion de l'emploi et l'insertion professionnelle des jeunes devrait disposer des capacités nécessaires pour non seulement assurer des formations professionnelles techniques pour les porteurs de projets mais également accompagner les initiatives entrepreneuriales et assurer un suivi comptable, administratif, financier et fiscal des jeunes entrepreneurs. Elle pourrait également soutenir les demandeurs d'emploi à la recherche de stages, de travail ou des qualifications supplémentaires ou des personnes en reconversion professionnelle. En son sein, un Centre national de gestion agréé pour accompagner les jeunes opérateurs économiques , un Département Financement disposant d'un fonds de garantie,d'un fonds d'amorçage des projets créateurs d'emplois, un Crédit entrepreneurial et un fonds d'investissement pour les projets créateurs de valeur ajoutée devraient y être créés.
Par ailleurs, les pouvoirs publics doivent continuer à réformer le pays avec intelligence, concertation et efficacité. Cela passe par une amélioration significative du climat des affaires avec un objectif de figurer parmi les 100 premiers dans le classement de la Banque Mondiale Doing Business. Ils ne doivent nullement se réjouir du classement actuel même si des progrès ont été enregistrés.
Les Comores doivent atteindre une plus grande liberté d'entreprise avec un climat des affaires plus attractif et plus compétitif. Les poches de népotisme et la systématisation de la corruption dans l'attribution des marchés publics sans appels d'offres transparents ou sans organe indépendant de contrôle des procédures de passation des marchés publics doivent cesser. Les recrutements techniques doivent se faire sur le fondement des compétences avec la mise en place de système de concours ou de sélection impartiaux et incontestables. Les embauches clientélistes et l'opacité de gouvernance publique ne peuvent perdurer pour assurer un décollage économique crédible et continu. A defaut, les Comores risquent de se déclasser et de continuer à pratiquer la politique de l'assistanat et de la mendicité.
Une facilitation des initiatives économiques de la diaspora comorienne et une plus grande intensité dans la collaboration et le dialogue avec le secteur privé reste crucial pour assurer une cohésion économique permettant la transformation économique avec une plus grande création d'emplois. Ce qui implique un allègement et une implication des procédures fiscales et comptables avec la dématérialisation des obligations des sociétés. De même, une politique concertée de soutien des petites activités du secteur informel avec un appui et une incitation financière pour une intégration progressive dans le secteur formel est un axe de travail qui exige une stratégie et un plan pluriannuel mettant en place un recensement préalable dans le cadre du plan de relance économique évoqué par les pouvoirs publics. Dans ce cadre, les communes doivent jouer un rôle clé avec la mise en place d'une réforme foncière débouchant sur la mise en place de Services municipaux et régionaux d"entrepreneuriat et d'accompagnement des jeunes dans les activités agricoles avec un volet de formation technique.
La volonté politique, une vision stratégique fondée sur l'équité et sur une justice impartiale luttant contre la culture de l'impunité et contre la corruption administrative et le respect strict des procédures judiciaires sont des facteurs essentiels pour jeter les fondamentaux incontournables pour soutenir la jeunesse et assurer la cohésion nationale.
Darchari MIKIDACHE
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