Par Darchari MIKIDACHE, président du think tank « Cercle des Économistes et des Experts Comoriens (CEEC) »
www.ceec-comores.com
Plusieurs fonds sont octroyés pour les projets d'énergies par les organisations internationales (BAD, Banque Mondiale, FMI, Banque islamique de Développement). Des projets sont en cours mais prennent du temps ou disons rencontrent un problème de management de projets à l'exemple des projets de fioul, gaz, réhabilitation des infrastructures d'eau etc. On ne peut se disperser à chaque fois. Il convient à l'avenir de coordonner les aides. Même si les énergies solaire et thermique restent toujours une excellente idée pour les Comores. Le saupoudrage des politiques publiques sans une vision ni une coordination de toutes les idées profiteraient aux bailleurs et à ceux qui se remplissent les poches continuellement sans forcement aider réellement le pays.
- Deuxièmement, il est certes possible d'emprunter à l'extérieur pour financer les projets d'envergure nationale mais dans quelles conditions et quels taux et est ce que cela est en cohérence et compatible avec le programme signé avec le FMI surtout que les Comores ont engagé un programme de désendettement. L'épargne nationale atteint selon le dernier rapport trimestriel de la Banque Centrale des Comores, 31 milliards de francs comoriens qui peuvent être transformés en emprunts à moyen et long terme pour financer des projets d'intérêts nationaux à l'exemple de la France qui utilisent l'épargne des Livrets A pour financer la construction et la rénovation de l'habitat social avec la Caisse de Dépôts et Consignations. Bien sûr, il existe des conditions et des critères à faire pour en arriver là. Par ailleurs, je te signale que les banques de la place sont surliquides. Cela signifie qu'elles ont de l'argent qui dort et qu'elles placent notamment à la Banque centrale (réserves libres en plus des réserves obligatoires) au lieu d elles placer sous forme de crédit à l'économie. Ce problème est récurrent et permanent depuis de nombreuses années. Avec des projets bien conçus, bancables et requérant une certaines crédibilité et du savoir- faire bancaire et financier novateur, il est possible d'utiliser les fonds locaux. La crédibilité et la gestion rigoureuse des finances publiques sont primordiales. Il faudra aussi envisager une baisse des taux d'intérêt.
-En troisième lieu, le développement du tourisme requiert plusieurs facteurs et non pas seulement la valorisation du patrimoine. Un article d'une page ne permet d'aller en profondeur sur le contenu. Il faudrait un plan Marshall dans le domaine à commencer par baisser les coûts de transports aériens, améliorer les infrastructures hôtelières, organiser des circuits touristiques avec les richesses existantes et bien sûr valoriser le patrimoine. Je pense que la priorité est de baisser déjà le coût des transports, améliorer l'offre hôtelière, promouvoir le pays, créer et organisme des centres attractif de loisirs (centres balnéaires, plongée, village de vacances pour les touristes, les familles, base de loisirs, valorisation de nos plages, faune et flore etc) et surtout organiser le circuit touristique tout en préservant le patrimoine naturel et historique à des coût attractifs. Améliorer un seul point ne suffira pas. Il faudrait reprendre à bras-le-corps ces axes de travail pour espérer agir avec efficacité. Mon article porte sur la diaspora non sur le tourismes spécifiquement bien que le problème de l'amélioration et développement de notre tourisme est essentiel.
Concernant la pêche, il est vrai qu'il faut valoriser ce qui existe à savoir l'école de pêche pour laquelle je crains qu'elle soit quelque peu négligée. Une société de pêche à capitaux mixtes (ETAT, particuliers, opérateurs privés et Qatar) a déjà lancé ses activités et a formé actuellement plus d'une cinquantaine de jeunes dans le domaine des ressources halieutiques. La question de la transformation des ressources halieutiques est très importante voire essentielle au développement de notre pays. Je ne cesse de le répéter. Faut-il bien sûr résoudre le problème d'énergie pour assurer une conservation efficace pour installer durablement une industrie transformatrice. (chambre froide, formation , moyens logistiques, apprentissage des techniques et leur vulgarisation....) La formation est indispensable. Notre pays a plusieurs handicaps à résoudre notamment la production halieutique, la conservation, corollaire de la nécessité d'énergie continue, apprentissage des techniques de conservation et de transformation de nos produits locaux etc). La création d'une chambre consulaire , chambre d'agriculture et de pêche va dans le bon sens mais cela reste insuffisant car il faudra promouvoir vraiment ce secteur avec un plan pluriannuel et un fonds d'appui dédié voire un crédit agricole ou de l'économie marine.
Concernant les avancées remarquables de l'Agence Nationale de la Promotion des Investissements (ANPI), le Directeur Général M. SAIDALI TOIHIR DAOUD et toute son équipe ainsi que les agences régionales ont des mérites. Son action doit être amplifiée. L'agence fait certes un travail formidable avec la facilitation de la création d'entreprises en moins de 72 heures, l’exonération partielle ou totale du dédouanement des moyens de production, la création d'un guichet unique, l'abaissement des tarifs d’enregistrement et des démarches de création d'entreprises, la fourniture d'information pour les investissements, l'organisation de forums pour les investisseurs etc. Néanmoins, à mon sens , il faudrait aller plus loin avec l'accompagnement des projets, la création d'un fonds de garantie, l'institutionnalisation d'une Direction d'appui des projets des migrants, l'octroi de facilités financières et la formation des créateurs d'entreprises. D'autres garanties en matière de sécurisation des investissements et de stimulations des initiatives privées sont possibles et possibles à l'exemple du MALI et du Sénégal...
L'Union des Chambres de Commerce et de l'Industrie par son dynamisme et ses actions de formations, d'accompagnement et de promotion des affaires et des investissements ( B to B) fait également un travail formidable. Il convient d’encourager ces institutions en les appuyant dans leurs actions. La création du crédit-bail, et de la cour d'arbitrage sont des mesures positives. D'autres propositions complémentaires sont possibles.
Il convient également de proceder à la création d'une grande direction voire une agence d'appui et d'accompagnement à la transformation des produits locaux et à la valorisation des richesses naturelles locales (halieutique, produits tropicaux, produits vivrières, labellisation et mise aux normes des produits aux normes d'exportation... sur des marchés divers...., avec un volet d'apprentissage technique important. Des bourses de formation technique dans des pays amis comme en Chine, inde, brésil, coopération Sud - Sud, sont tout à fait envisageables. De même, il convient d'envisager de former des formateurs dans ces domaines afin qu'ils viennent à leur tour former des nationaux dans ces domaines.
Il est également possible que l’État comorien mette en place un dispositif ou programme d'accompagnement et de recherche de marchés ou de débouchés pour les opérateurs économiques désirant conquérir d'autres marchés dans l'océan indien , dans le marché commun de l'Afrique Orientale et Australe, (COMESA), voire d'autres marchés européens pour la diaspora ou le marché américain avec l'accord African Growth and Opportunity Act (AGOA) dont les Comores sont éligibles depuis plus de 8 années.
Je ne prétends pas détenir la vérité ce qui est possible de faire. Néanmoins, ce que je propose modestement constitue possibles des pistes et d'autres pays les ont déjà mis en pratique. On peut proposer et également de ce qui marche ailleurs. Soyons novateur, sage en tirant profit des expériences réussies des autres. Des actions interministérielles sont souhaitables et possibles pour éviter le saupoudrage et le manque de coordination des politiques publiques tout en prenant en compte tous les aspects des problématiques de développement et la résolution des problèmes que rencontrent nos concitoyens au quotidien (énergie, électricité, eau, cherté de la vie, lenteur de la justice, nécessité de sanctionner immédiatement administrativement les actes actifs et passifs de corruption en plus de l'application de la loi).
J'appelle de mes vœux la mise en place d'une table ronde de financement du développement des Comores avec un programme de développement pluriannuel comprenant des projets bancables bien ficelés. Le Bénin a 'organisé sa table ronde pour le financement du développement du Bénin au siège de la Banque Mondiale sur 3 jours le 3 juin 2014. Il a obtenu des engagements de financements de près de 12 milliards de dollars sur des projets structurants de développement national. La table ronde comorienne ouvrirait un dialogue national sur les défis de développement à l'horizon 2030, le financement, la programmation et la mise en œuvre des projets structurants permettant aux Comores de sortir du classement des pays les moins avancés afin de passer à un pays à revenu intermédiaire à l'exemple du Cap-vert et de l'île Maurice. Ces assises nationales ouvriraient un dialogue concerté, permanent et transparent entre les opérateurs économiques nationaux, les investisseurs étrangers institutionnels et privés, les acteurs de la diaspora et les institutions financières internationales, les organisations de la sous- région, des pays amis du monde arabe, européen et asiatique. La coopération Sud-Sud devrait également être explorée en profondeur avec une diplomatie économique offensive et dynamique.
Darchari MIKIDACHE
Président du Cercle des Économistes et des Experts Comoriens (CEEC)
Économiste et fiscaliste
www.darcharimikidache.over-blog.com
https://www.facebook.com/darhari.mikidache.public